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Les origines du Berger blanc suisse

Le 3 février 2014 PAR Anva - 4 (381 votes)
Illustration de l\'origine du-Berger blanc suisse

L'histoire du berger blanc suisse peut être vue comme une grande morale. Pendant longtemps évincée et considérée comme une dégénérescence, elle s'avère en réalité être une race possédant de nombreuses qualités au même titre que le Berger Allemand. Pourtant il aura fallu de nombreuses générations, et long combat de la part d'éleveur pour que son injustice soit enfin entendue et rectifiée.

Des origines particulières

Une rumeur raconte que la race aurait été le chien favori de la famille royale des Habsbourg. Selon elle, les dames adoraient le blanc de ces chiens à l'allure athlétique et gracieuse, parce qu'ils étaient élégants et cadraient parfaitement avec leurs chevaux blancs ( ceux qui tiraient leur carrosse royal ) en plus d'inspirer la richesse et la noblesse. Il apparaît que parce que cette famille a eu une grande réputation et beaucoup d'influence dans toute l'Europe, la race serait devenue célèbre par leur intermédiaire. Une des raisons pour laquelle le Berger Blanc était surnommé "Blanc d'Alsace". Si l'Alsace a effectivement était le berceau des Habsbourg pendant de nombreuses années, aucun document et aucune peinture n'a été trouvée prouvant l'authenticité ou l'inexactitude de cette information.

Cependant, on entend parler pour la première fois d'un berger blanc au XVe siècle dans un document(traduit de l'italien) stipulant les exigences du moment face au chien de berger : "Un berger ne doit pas être épais et lourd comme un chien bâtard, mais devrait être au moins aussi fort, courageux et rapide, parce qu'il ne doit pas seulement se battre et lutter, mais il doit aussi être capable de marcher et chasser les loups de la région. Il est donc préférable qu'il est un corps plus long que court et carré [...]. Ces chiens doivent donc être totalement de couleur blanche, de sorte que le berger puisse facilement distinguer les deux dans la nuit et à l'aube ". (1)

Rien ne prouve qu'il s'agit d'un ancêtre du Berger Blanc Suisse, d'autant plus qu'on sait que la race a été créée à partir des premières souches du Berger Allemand. Néanmoins, rien ne dit non plus que ces premières souches ne provenaient pas de ces fameux bergers blancs qui existaient déjà à l'époque du Moyen Age, puisque de toute évidence ces chiens blancs étaient là à un moment donné.

Greif von Sparwasser
Greif von Sparwasser - 1882

En revanche, nous savons de source sûre que la race existait au XIXe siècle. Lors d'une exposition canine qui eut lieu à Hanovre en 1882, on voit défiler pour la première fois deux chiens de type berger de couleur blanc, le premier Kirass un mâle gris-blanc et l'autre Greif un mâle complètement blanc.(2) C'est à partir de Greif que toute l'histoire du Berger Blanc Suisse va découler. Né en 1879 dans le chenil Friedrich Sparwasser situé à Frankfort (Allemagne) il se révèle être en réalité le grand-père de Horand Von Grafrath (né en janvier 1895) qui n'est d'autre que l'ancêtre du Berger Allemand.(3) Ces éléments sont importants dans l'histoire du Berger Blanc puisqu'ils démontrent que le gène correspondant au poil blanc était déjà présent au moment de l'élaboration du Berger Allemand.

Jusqu'à présent, dans toute l'Europe, chaque pays avait son chien de berger, et dans chaque pays, on trouve des races différentes selon la région ou la pratique locale. Mais lorsqu'arrive la révolution industrielle, ces chiens, de moins en moins utilisés, sont menacés de disparaître. C'est pourquoi, en Allemagne, de nombreux éleveurs tentent de regrouper tous les chiens de berger pour en faire une race unique. Leur objectif était simple : créer une race performante, efficace et qui correspondent à leurs attentes. À ce moment-là, l'apparence ne faisait pas partie des critères de sélection. Ainsi, on observe dans les expositions canines des chiens de type berger de couleur blanc. C'est le cas par exemple en 1888 avec Greifa et Russin à Hamburg et en 1889 à Kassel avec Greif II. D'autres bergers blancs étaient également présents, mais ces trois-là sont les plus marquants parce qu'ils représentent les descendants directs de Greif.

Le développement du Berger Blanc Suisse

En 1899, après avoir fait l'acquisition de Horand Von Grafrath, rebaptisé Hector Von Linkshrein, le Capitain Von Stephanitz fonde le club du berger allemand ( Verein für deutsche Schäferhund - SV en abrégé ) avec son ami Arthur Meyer et publie en septembre de la même année le premier standard de la race. Il fixe les limites : l'animal devra être un chien de travail, robuste, loyal, obéissant et intelligent. Horand Von Grafrath sera par ailleurs le premier chien inscrit sur le livre des origines SV de la race. Aucune couleur n'a été exclue par le standard, mais on commence à remarquer une préférence pour les bergers de couleur jaune/marron et feu/noir.

Au cours des premières décennies d'élevage plus de la moitié des chiens inscrits ont eu une portée comportant des chiots de couleur blanche y compris Berno von der Seewiese né le 24 mars 1913 et qui est le 5èm descendant direct de Horand et le premier chien blanc allemand inscrit dans le SV(4). Le succès du Berger Allemand est à son comble, lentement, mais sûrement les chiens sont exportés dans en Amérique. En 1913, un petit groupe de 26 passionnées fondent le club du berger allemand d'Amérique avec à sa tête Mme Halstead-Yates et parmi eux Ann Tracy une personne reconnue dans l'histoire du Berger Blanc Suisse. Le 27 mars 1917 va naître dans son chenil "Stonihurst" une portée de quatre chiots blancs, Edmund, Eric, Eadred et Elf, qui sont soupçonnés d'être les premiers berger blanc élevé et inscrit aux Etats-Unis. Avec eux, elle démarre la lignée des Bergers Blanc. Parallèlement, à l'autre bout du pays, une autre lignée blanche se compose, HN Hanchet, en important trois chiens issus de la descendance - dit-on - de Von Habsbourg. De cet élevage beaucoup d'entre eux seront exportés aux quatre coins de la planète, notamment en Australie. Le Berger Allemand Blanc commence à se répandre.

Horand Von Grafrath
Horand Von Grafrath - 1899

À la fin de la Première Guerre mondiale, de nombreux soldat revenant d'Allemagne parlent d'un chien incroyable, utilisé par l'armée Allemande et par la Croix-Rouge et déployable à tous les niveaux. Un chien facile à dresser, courageux à toute épreuve, capable de différencier l'homme vivant du mort. Ils le décrivent comme un chien avec un cerveau humain. La nouvelle fait l'effet d'une bombe, sa popularité s'amplifie et les ventes des chiots explosent comme leur prix. C'est aussi l'époque ou le cinéma muet sort des films comme Rin tin tin ou Strongheart, où le héros n'est d'autres que le célèbre Berger Allemand. Le Bergers Blanc sera également apprécié grâce à son manteau qui le rendait bien visible à l'écran. Désormais tous les enfants veulent leur Rin tin tin ou leur Strongheart à la maison. Ainsi vont naître de nombreux élevages à grande réputation tels que Longworth, Giralda Ferme et Grafmar.

Une race bafouée et rejetée

En 1921, Stephanitz affirme dans son livre(4) que "la couleur du chien n'a aucune importance pour le service". Et justifie que les "chiens de berger allemands n'ont jamais été élevés pour la couleur, qui pour le chien de travail est une considération tout à fait secondaire." Pourtant en 1933, il va modifier le standard de la race et en exclure la couleur blanche. Désormais en Allemagne tous les chiots qui naissent blancs sont d'office éliminés de la portée, ce qui porte un gros coup au berger blanc.

Suite à cette décision, de nombreuses querelles ont eu lieu entre les pros du Berger Allemand de couleur et ceux du Berger Allemand Blanc. Ces derniers se sont acharnés pendant des décennies à prouver l'innocence de la race. Une race bafouée et rejetée sous prétexte que le gène blanc serait responsable de nombreuses maladies telles que l'albinisme, la surdité, la cécité, l'instabilité mentale, la perte de vigueur... En clair, la couleur blanche n'était rien d'autre qu'une dégénérescence de la race qu'il fallait à tout prix supprimer avec la sélection.

Chien de berger blanc
Chien de berger blanc

Et on peut dire que le message est passé ! Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Bergers Blanc se font de plus en plus rare en Allemagne. Difficile d'ailleurs de trouver une trace de leur présence. Et en 1959, c'est au tour des Etats-Unis de se ranger dans la norme allemande. Le club du berger allemand d'Amérique rectifie son standard, désormais tous les chiens possédant plus de 50 % de blanc sur leur manteau seront d'office disqualifiés des expositions. Cette nouvelle règle fait fureur mais sera malgré tout voté avec 306 voix pour et 110 voix contre. Mais on pouvait encore les inscrire avec la mention "couleur blanche disqualifié". En raison de ce changement, les chiots de couleur blancs ont été systématiquement éliminés dès leur naissance. La population de berger blanc frôle l'extinction.

Pourtant, de nombreuses études, comme celle du Dr Peter Lorenz Neufield, chercheur et biologiste prouvent qu'un berger blanc au museau bien pigmenté et yeux sombres ne peut pas être tenu pour responsable des problèmes de trouble de la vision ou de l'audition et encore moins une instabilité mentale. Ces chiens sont tout ce qu'il y a de plus normal si ce n'est qu'ils ont un poil blanc. Ainsi si c'est différentes maladies peuvent effectivement exister sur les chiens à poils blancs, elles ne le sont que sur de véritables albinos, c'est-à-dire des chiens ayant un museau et des yeux clairs. Le berger blanc n'est rien d'autre qu'une victime de discrimination. Mais la machine est lancée, difficile de faire machine arrière ! L'Allemagne lance une campagne visant à interdire les chiens de berger blanc.

Des passionnés qui ne lâchent rien

En 1964, tandis que la race s'éteint en Europe, certains éleveurs et passionnés américains et canadiens continuent de s'opposer à ces nouvelles mesures. Sentant la catastrophe arriver pour cette si belle race, le premier club de Berger Blanc est fondé en Amérique.

En 1967, la naissance de Lobo White Burch, un berger blanc, change la donne. Bien qu'il soit né un an plus tôt en Amérique, sa propriétaire Agatha Burch se rend dans son pays natal, en Suisse avec son chien Lobo et importe d'Angletterre une femelle berger blanc du nom de White Lilac de Blinkbonny. Tous les deux seront enregistrés dans le livre des origines suisse sous l'appellation de berger allemand blanc. Un an plus tard l'American Kennel Club décide d'évincer le Berger Allemand Blanc de son livre de race. En 1973, Agatha Burch fera une portée de Lobo et Lilac qui pourra être enregistré avant que la Fédération cynologique International ferme tous les livres attribués aux descendants des bergers blancs du monde, rendant impossible la moindre inscription !

Lobo White Burch
Lobo White Burch - 1970

Cependant, les passionnés ne lâchent pas l'affaire et continue de faire vivre la race. Un Suisse, Kurt M. Kron, fait l'acquisition Shangrila's Sweety-Girl, fille de l'alliance Lobo/Lilac et qu'il fera à son tour reproduire avec Kokes Mahalo. De cette union naîtra Champion Von Kron en 1980. Si Lobo est à la souche de Champion Von Kron, ce dernier en revanche enregistre pas moins de 598 descendants en seulement trois générations ! La race du Berger Blanc redémarre.(5)

Pendant ce temps, le combat pour la reconnaissance de la race continue. Martin Faustmann, éleveur de berger allemand de couleur fait l'acquisition d'un descendant de Lobo qu'il ramènera chez lui en Allemagne dans le but de le faire reproduire et détenir une lignée blanche. Il se battra pour acquérir la possibilité d'enregistrer ses chiens blancs et suite à de nombreuses difficultés, il décide d'ouvrir un nouveau registre pour la race et de l'inscrire sous un autre nom. Le berger blanc devient alors le berger américano-canadien.

Des associations et organismes engagés

Suite à la décision du Kennel Club de supprimer le berger blanc de son livre, de nombreuses associations se montent dans les pays tel que l'Amérique, le Canada, l'Australie, la Hollande, la Suisse, les Pays-Bas ... Dans une époque où règne encore des conflits politiques et ou la communication interne comme externe peine à passer, de multiples personnes se sont engagées, chacune à leur niveau, pour protéger, préserver et redonner une identité au berger blanc injustement condamné.

C'est pourquoi, en 1969 une deuxième association de berger blanc sera implanté en Amérique le WGSD, cette dernière changera de nom à deux reprises en 1976 et 1977 pour devenir le WGSDCI ( White German Shepherd Dog Club International ). L'association est conçue pour cesser le massacre et redonner confiance à l'opinion publique vis-à-vis du berger blanc. L'objectif : continuer d'élever le berger blanc quelles que soient les décisions du club du berger allemand et faire comprendre aux éleveurs que la race n'a rien de dégénéré. Par ailleurs, en 1973 la présidente publie un communiqué : (traduit)

Champion von Kron
Champion von Kron

" Le Berger Blanc n'est pas un navet. Il existait avant l'arrivée de Von Stephanitz, ou standard de la race, ou GSDCA! Ce n'est pas notre intention de devenir, comme ils veulent que nous fassions, le berger de couleur perdure, mais nous souhaitons vivre en harmonie avec eux. Nous n'avons certainement pas l'intention de détruire, afin de satisfaire le destin futur de l'GSDCA et il n'est pas dans notre intention d'arrêter l'élevage de ces chiens merveilleux en raison du simple fait qu'il y a quelqu'un a décidé depuis longtemps que la couleur foncée de nos chiens était mieux que la couleur blanche. Nous avons vu beaucoup de beaux bergers allemands de couleur foncée, et nous avons vu beaucoup qui n'ont certainement pas été honorés. La même chose s'applique pour le berger blanc. Il y a beaucoup de merveilleux blanc, mais nous sommes conscients qu'il y a certains qui sont loin de notre niveau. Quoi qu'il en soit, nous tenons à préciser que cette situation n'est pas spécifique à notre race, mais existe dans chaque race connue. Il est de la responsabilité de chaque association de sensibiliser les éleveurs, mais aussi au grand public de connaître le type d'une race particulière."(6)

En 1970, le Canada se lance aussi dans la lutte pour la conservation et reconnaissance du Berger Blanc avec le WSCC (White Schepherd Club of Canada ). Cependant, les mesures prises par le GSDCA ont un impact énorme sur la population des bergers blancs, mais aussi dans leur utilité au travail (chien guide d'aveugle, chien de police, chien de sauvetage, chien de surveillance)... Des personnes qui étaient pourtant habituées à travailler avec ces chiens, avec fierté, ont soudainement décider d'arrêter de s'en servir parce qu'une personne leur a dit que ce n'était pas de bon chien. Or elles avaient la preuve sous leurs yeux, tous les jours à travailler avec eux. Elles les ont vu grandir, elles les ont éduqués et formés pour des missions qu'ils ont remplies à merveille et sans accro. Difficile de comprendre ce retournement soudain face à la race. Néanmoins certaines personnes ont écouté leur instinct, comme le Sergent Bryan Anthony de Londres qui a décidé de laisser une seconde chance à Prince. Il lui fait faire une série d'examens et de tests comme pour soixante autres chiens ; au final Prince sera sélectionné pour ses aptitudes incroyables que le sergent n'hésitera pas à faire savoir autour de lui. Il en va de même pour une institution d'aide aux aveugles qui continuera d'élever et de former des chiens blancs quoi qu'on en dise parce qu'ils ne les estiment pas différents des bergers de couleur.

dorothy crider
Dorothy Crider avec son Berger Blanc Suisse

Curieusement au cinéma, le berger blanc ne sera pas exclu. Au contraire, il gardera sa place sur le petit et grand écran, notamment auprès de Dorothy Crider, dresseurs et éleveur de chien du cinéma la plus célèbre de l'époque avec plus de 160 films à son actif où brille de nombreux chiens de couleur blanche.

En 1989, la Suisse crée également son association Weisse Schäferhunde Gesellschaft Schweiz ( association de berger blanc suisse ), qui intégrera en 1991 le Kennel Club Suisse. Tous les chiens de berger blanc suisse pourront désormais être enregistrés sur le livre des origines suisses. Il s'agit là d'une première étape vers la reconnaissance par la FCI. En 1998, le standard de la race international suisse (en Europe) a été adopté et est maintenant utilisé dans presque tous les pays européens.
En Amérique, l'association AWSA crée en 1998 a pour objectif de protéger, promouvoir et faire progresser les intérêts et le bien-être du berger blanc ainsi que de continuer à se battre pour faire reconnaître la race comme une entité distincte. Et en 1999, elle sera enfin reconnue comme une race distincte.
Le 26 nov 2002 la FCI approuve provisoirement le berger blanc et la Suisse devient la mère du Berger Blanc que l'on appellera désormais Berger Blanc Suisse. La race sera également reconnue un an plus tard par la SCC ( Société Centrale Canine ). Enfin le 5 juillet 2011, le FCI reconnaîtra officiellement la race.

Sources
1- Petrus de Cresentis - 1494
2- Le chien loup alsacien - Horowitz - 1923
3- Le berger allemand, son histoire, son évolution et sa génétique de M.B. Willis
4- The German Shepherd Dog in Words and Picture - Stephanitz - 1923
5- Base Pédigree
6- Int's 'Shepherd's Din - Gail Finkeldei - 1973
Le Berger blanc suisse Les origines du Berger blanc suisse
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